Vous venez d’annoncer votre départ de Listigo. Pouvez-vous nous en dire plus ?

J’ai estimé qu’il fallait savoir laisser la place à d’autres. J’ai fait ce que je pouvais pour faire avancer le sujet du partage de mandats, mais il est temps qu’un nouveau souffle prenne le relais. Mon souhait le plus sincère est que mon successeur parvienne à convaincre de l’urgence à réunir tous les systèmes de partage de mandats.

C’est aujourd’hui un enjeu majeur pour l’avenir de notre profession.

Pourquoi cette union est-elle devenue si cruciale ?

La fulgurance de l’IA représente pour notre secteur un tournant décisif. Elle risque de bouleverser profondément nos métiers, car les particuliers vont eux aussi s’en emparer. Si nous, professionnels, ne faisons pas front commun, nous risquons de voir nos parts de marché s’éroder au profit des plateformes de particulier à particulier. Il faut donc jouer collectif. Face à l’intelligence artificielle, l’union des professionnels n’est plus une option.

Comment expliquez-vous cette réticence des professionnels à unir leurs forces ?

Les clivages persistent entre les agences traditionnelles, les mandataires et les modèles hybrides. Il faut changer de logiciel intellectuel car le monde a évolué. On ne peut plus raisonner avec les schémas d’il y a 20 ans. Les réseaux de mandataires représentent environ 20 % du marché et on ne peut pas les ignorer ni les mépriser.
Si l’on continue à dire “on veut bien travailler ensemble, mais pas avec eux”, on passe à côté du sujet. Ce n’est pas une question d’ego ou d’étiquette, mais d’efficacité et de survie collective. Si rien ne bouge, les faits parleront d’eux-mêmes : le marché nous dépassera.

Quel message souhaitez-vous faire passer aux professionnels de l’immobilier ?

J’ai toujours défendu l’idée qu’il fallait que les professionnels représentent l’exhaustivité de l’offre immobilière à un instant T. Cette dernière ne peut exister que par un système de mandats partagés. Prenez n’importe quel produit du quotidien : en trois clics, vous accédez à l’ensemble de l’offre mondiale. Mais pour un achat immobilier, pourtant l’un des actes les plus importants de la vie, aucun système n’offre aujourd’hui une vision exhaustive du marché. Les portails font ce qu’ils peuvent, mais ce n’est pas suffisant.

Cette exhaustivité devrait être l’apanage des professionnels de l’immobilier, grâce à un système de mandats partagés ouvert et collaboratif. Dans beaucoup de pays, la collaboration entre professionnels est une évidence. Le consommateur ne se pose même pas la question : c’est le professionnel qui lui trouve son bien. Cela prouve qu’ailleurs, les acteurs ont su dépasser leurs querelles pour se centrer sur le seul intérêt qui compte : le client. C’est une leçon que nous devrions méditer.

Cet article « Face à l’intelligence artificielle, l’union des professionnels de l’immobilier n’est plus une option », Bernard Cadeau est apparu en premier sur Journal de l'Agence.